Modélisation et impression 3D d’une caméra Arriflex 16 ST
// Fabrication numérique // Modélisation et impression 3D d’une caméra Arriflex 16 ST
Lors de la production du spectacle Pour la suite du monde au Théâtre La Bordée en septembre 2023, nous avions besoin d’une caméra Arriflex 16 ST comme accessoire de jeu. Ces caméras, lorsqu’achetées d’occasion, peuvent coûter entre 1000$ et 3000$. Cependant, pour notre usage, elle n’avait pas besoin d’être fonctionnelle; seule son esthétique importait.
Recherche
En réunion de production, nous avons envisagé la possibilité d'imprimer une réplique en 3D. Après quelques recherches sur Internet, nous sommes tombés sur un modèle 3D.
Cependant, celui-ci présentait quelques problèmes.
Contrairement à une modélisation traditionnelle, cette caméra n'avait pas été créée par un artiste 3D, mais plutôt scannée à l'aide de la photogrammétrie. Cela signifie que plusieurs photos du modèle sous différents angles ont été assemblées dans un logiciel tel que Reality Capture pour obtenir une version numérique.
À première vue, l’objet semblait utilisable, mais il était loin de l'être pour l'impression 3D. Les modèles créés à partir de photogrammétrie contiennent souvent des défauts dans leur mesh (leur enveloppe formée de triangles ou de polygones), qui sont camouflés par la texture. Pour qu'un modèle soit adapté à l'impression 3D, il doit être complet et idéalement sans parties flottantes. Malheureusement, le modèle 3D de caméra Arriflex que nous avions trouvé sur Internet présentait des défauts, rendant difficiles son impression et son assemblage ultérieur.
Modélisation
Ainsi, après l’analyse du mesh, j'ai plutôt décidé de relever le défi de modéliser la caméra à partir de zéro. Cependant, cela ne signifie pas que le modèle issu de la photogrammétrie était inutile. Au contraire, il m'a servi de référence pour avoir les bonnes proportions.
Grâce à cette référence, j'ai pu procéder à un blocking avancé, c'est-à-dire que j'ai élaboré les volumes de base de la caméra et je l'ai divisée en sections réalisables sur mon imprimante Ender 3. De plus, j'ai dû créer un espace vide à l'intérieur pour y ajouter un peu de poids. Cette sensation de pesanteur était essentielle pour ajouter du réalisme dans le jeu des acteurs.
Mon choix s'est porté sur le logiciel 3ds Max pour commencer le travail. Mes connaissances étant relativement limitées, ayant seulement suivi deux cours de formation en modélisation 3D, j'ai dû faire face à certains défis liés à mon manque d’expérience. Cependant, puisque le modèle était destiné à l'impression 3D et non à une intégration dans un univers virtuel, certains aspects comme la gestion des polygones et l'interpénétration de volumes étaient moins importants. De plus, les textures allaient être réalisées en vrai, ce qui signifie que je n'avais pas besoin de me concentrer sur les UVs, c'est-à-dire le dépliage de l'enveloppe de l'objet.
Impression
Une fois la modélisation de la caméra terminée, j'ai divisé le modèle en trois parties distinctes pour faciliter l'impression : la bobine, le corps et la lunette. J'ai également ajouté une petite plaque accessoire pour boucher le trou destiné à accueillir du poids. Pour m'assurer que la caméra était imprimable, j'ai réalisé un test à échelle réduite.
Lorsque j'ai jugé que mon modèle était prêt, j'ai entamé le processus d'impression. En optimisant l'espace disponible sur la plaque de l'imprimante, j'ai pu atteindre 85% de la dimension réelle de la caméra. Une fois la taille de celle-ci validée avec l'équipe, j'ai lancé l'impression complète.
Pour garantir la solidité de l'objet, j'ai utilisé un remplissage interne (fill) relativement élevé, ainsi qu'un paramétrage d'imprimante visant à minimiser le temps d'impression. Étant donné que l'objet allait être vu de loin, la précision des détails n'était pas une priorité lors de la réalisation.
L'impression a pris environ 50 heures au total, nécessitant une bobine de filament PLA d'environ un kilogramme.
Une fois l'impression terminé, j'ai procédé à une légère post-production, notamment en retirant les supports et en ponçant certaines parties. Cependant, j'ai remarqué plusieurs défauts. Le plus notable étant le layer shift, c'est-à-dire un décalage entre certaines couches d'impression. Bien qu'il existe différentes causes possibles, ma théorie est que la vitesse de déplacement de la tête d'impression, jumelée à la grosseur de l’objet, a parfois entraîné un glissement du mécanisme de contrôle sur les axes X et Y, provoquant un léger décalage.
Si la caméra avait été créée à des fins d’exposition, comme pour un buste ou figurine, il aurait été nécessaire de recommencer l'impression. Cependant, dans notre cas, ces défauts importaient peu.
Résultat
Pour la dernière étape, j'ai confié l'accessoire à Marianne Lebel pour qu'elle le peigne et le finalise. Voici le résultat!
En résumé, cet accessoire, dont le coût était initialement estimé entre 1000$ et 3000$, a finalement coûté environ 100$ en matériaux et en impression grâce à la modélisation et à l'impression 3D.
Ce projet a nécessité des compétences pour trois procédés techniques essentiels : la modélisation 3D, l'impression 3D et la finition d'accessoires.
Si vous avez des besoins semblables, je serais ravi de vous mettre en contact avec des étudiants du programme d'animation 3D et de synthèse d'image du Cégep de Limoilou, qui possèdent les compétences nécessaires pour modéliser ce genre de petits objets. Un partenariat avec ces étudiants pourrait s'avérer être une solution avantageuse pour toutes les personnes impliquées.
Merci de m'avoir accordé votre temps et votre attention !